Journal d’une confinée #2 – Ma famille a l’air sympa

Cinquième jour. J’ai encore oublié de passer la raclette dans la douche, mais mon méfait n’a pas été repéré. Je devrais m’en tirer ni vue, ni connue. L’entente à la maison est au beau fixe. Mon humour n’y est pas pour rien. A vrai dire, je pense que je suis le pilier de cette famille, mais je n’en dis rien pour ne pas avoir l’air d’avoir le melon. Aussi, mes activités pour les 50 ans et plus semblent contribuer au bon fonctionnement de la maison. Tous les soirs, à 19h, mes parents et moi picolons avant le repas. Heureusement, nous avons prévu les réserves de vin au lieu de miser sur les pâtes. A long terme, je pense que c’était ce qu’il y avait de plus stratégique à faire. Le soir, nous regardons un film. Bon, il m’arrive de fuir en cours de route, parce que je ne suis pas tout à fait certaine des goûts parentaux.

J’ai parlé avec mes parents, ils ont l’air sympas

Ce matin, avant le déjeuner, j’ai décidé de parler avec ma mère. Je me suis dit que le confinement était l’occasion d’établir un contact. J’ai opté pour une approche douce, en misant sur un souvenir commun : « Dis maman, tu te souviens quand la première téléréalité est sortie, le Loft, là ? Tu te rappelles avoir pris un abonnement au câble pour les regarder H24 ? » L’approche a été fructueuse, le contact fut rapidement établi. « Bah tu vois, Maman, là on est en train de le vivre ». Ma mère a ri, bim, c’était dans la poche. J’ai donc proposé qu’on installe un confessionnal dans les toilettes et que le chien devienne le maître du jeu. Bien sûr, ce n’est qu’une stratégie pour prendre les rênes dans la maison. Tous les vendedis, nous ferons un Prime Time où un membre de la famille sera éliminé. Mais bon, comme on n’a pas le droit de quitter la maison, la sentence se soldera par un tour dans le jardin. Ce soir, on a oublié de le faire parce qu’on a choisi l’activité apéro, mais je ne désespère pas de faire coucou à l’un d’eux par la fenêtre, la semaine prochaine.

Bon, le problème d’ambiancer mes parents, c’est qu’ils se sentent un peu trop à l’aise avec moi désormais. J’ai eu le droit à des blagues grivoises entre eux. Je vous passe les détails, mais du sang a coulé de mes oreilles. En plus on était à table. J’ai essayé de creuser un trou pour disparaître sous ma chaise. Mon chien s’en est pris à la fourchette. Bref, ce fut un échec.

Merci les nouvelles technologies !

Aujourd’hui, j’aurais dû monter à Paris et fêter l’anniversaire d’une de mes meilleures copines, et demain j’aurais dû me réveiller dans un super hôtel pour mon propre anniversaire, avant de vivre la meilleure soirée de ma vie. Au lieu de ça, je suis confinée à Vergèze, avec mon chien qui mange mes chaussures et me pète dessus quand on regarde un film. Heureusement, il y a des applications comme Zoom, alors je vais fêter mon anniversaire en visio avec mes meilleurs copains. L’improvisation, c’est la clef du bonheur. Même si cette semaine n’a pas été très différente de mes semaines de travail habituel, il a été un peu plus difficile de se concentrer vu que tous mes potes sont confinés, au chômage technique et en plein craquage. Je reçois des chorées et des pétages de plomb quotidiens. Cette période me permet de me rendre compte que, tout de même, j’ai des potes super drôles. L’une d’elle, tout aussi introvertie que moi, a même réussi à se mettre en couple avec son coup de cœur de longue date sans sortir de chez elle, par message. Je suis admirative. Je vous avoue que je n’aurais pas forcément misé sur Raiponce, si j’avais dû choisir la princesse dont je voulais tester l’existence. C’est à dire que j’ai les cheveux longs, mais pas de là à permettre à un jeune homme de se hisser jusqu’à ma fenêtre. En plus, je n’ai aucune force dans les bras. Je ne cesse de penser à ces gens sur les applications de rencontre qui vont être obligés d’essayer de se séduire pour de vrai et qui vont sortir de cette période de confinement avec les dents qui rayent le parquet. Je rigole beaucoup. Les rendez-vous vidéos, n’empêche, ça a son charme. On peut mettre un joli haut puis rester en survêt’ en bas. Si la personne est ennuyeuse, on peut prétexter une coupure de réseau. Sinon, on reste 3h au téléphone avec, et bam, on se rend compte qu’on va devoir attendre 6 semaines avant de rencontrer la personne pour de vrai. Une vraie roulette russe. Non, ça ne sent pas le vécu, qu’est-ce que vous me racontez ?

Les adaptations encore en cours

La bonne nouvelle, c’est que mon frère ne viendra pas se confiner avec nous, son travail a annulé la mission. Je vais donc pouvoir continuer de squatter sa chambre, l’air de rien. Niveau travail, justement, j’essaie de faire plus de pauses que d’habitude, vu que je bosse dans la pièce où je dors pour avoir du calme et que je n’ai aucune option de sortie pour m’aérer un peu les idées. Je me perche sur le rebord de la fenêtre pour lire. De là, j’ai vue sur le parc du village. Il ne me manque qu’une carabine à plomb pour donner une leçon à tous ces imbéciles qui n’ont rien compris à la notion de confinement et qui se baladent tranquillou-pépouze dans le parc, avec leur meute d’enfants, et à cause de qui le confinement durera plutôt 6 semaines qu’un mois.

Sinon, d’après ma mère, mes pantoufles sentent le chien mouillé, ou le chat mort. Je suis assez perplexe, n’ayant aucun odorat. Mais du coup, dès qu’elle m’embête, je lui mets les pantoufles sous le nez. La technique est efficace (c’est tout l’avantage d’être souple). Je pense donc ne jamais les mettre à la machine, cette arme de défense devrait préserver l’harmonie du foyer.

 

Trop hâte de vous raconter mes 25 ans en confinement. Je vous fais des bisous !

1 Comment

  1. Journal dune confinée #3 - Joyeux Coron'anniversaire !

    mars 22, 2020 at 7:25

    […] qu’éloignée de mes proches, j’ai la chance d’être confinée avec mes parents, donc je n’étais pas totalement seule. Dès le réveil, j’ai eu le droit à des […]

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